Les prairies Saint-Martin sont un site de 29 hectares proche du centre-ville de Rennes, anciennement composées de prairies ponctuellement fauchées par la ville, d'une friche industrielle, d'anciens jardins familiaux (supprimés à cause de l'inondabilité du secteur et de la pollution des sols issue des anciennes activités industrielles), d'une zone habitée et de zones boisées. Au cours des dernières décennies, le site s'est très progressivement enfriché du fait de nombreux changements d'usages. Le projet de parc naturel urbain coordonné par l'agence Base implique une conversion marquée de la morphologie et des affectations fonctionnelles du site. Il tend à transformer cet espace en zones de loisirs, prairies et zones humides. La mise en place du parc implique la réouverture du milieu par coupes d'arbres et de buissons, l'excavation d'une partie des terres et l'expropriation d'une partie de la zone habitée.
Encadré par le canal Ille-et-Rance et le bras naturel de l'Ille (affluent de la Vilaine), l'écluse Saint-Martin et le boulevard intérieur, cet espace à la densité végétale peu commune en centre urbain suscite depuis plusieurs années l'intérêt des chercheurs travaillant sur le territoire de l'agglomération de Rennes. En 2011, l'INstitut Écologie et Environnement (CNRS) a soutenu la mise en place d'un observatoire d'écologie urbaine sur le site afin d'enregistrer l'impact de l'évolution des pratiques anthropiques sur la biodiversité. Cet observatoire s'inscrit dans la Zone Atelier Armorique (USR 3613, CNRS), dispositif d'observation et de compréhension des dynamiques environnements-sociétés sur le temps long. Il implique différents laboratoires (ECOBIO, ESO, HCA, LETG-Rennes, INRA-SAD-Paysage) et plusieurs disciplines (art, climatologie, écologie, géographie).
Cette communication propose, à partir de l'analyse des données prélevées et collectées sur le site, de révéler l'évolution des usages diversifiés de cet espace urbain temporairement en friche (les prairies Saint-Martin) par sa traduction spatiale et écologique. Le propos s'appuie sur les observations enregistrées depuis 2013 (après l'expropriation de la majorité des usagers de jardins familiaux) à 2017 (début de la phase de gros-œuvre du chantier d'aménagement du Parc naturel urbain). Les données enregistrées sont :
- la collecte d'observation des fréquentations sociales et des mobilités internes
- le suivi intra annuel de la dynamique paysagère en télédétection à très haute résolution spatiale
- la distribution spatiale des espèces et la dynamique des communautés animales
- un Observatoire Photographique du Paysage constitué de 24 points de vue répartis sur le site et reconduits quatre fois par an pour suivre le rythme des saisons.
Le croisement des données et leur analyse s'appuie sur la complémentarité des regards et des disciplines. Via les distributions et les flux, les maillages et les pavages de l'espace, les dynamiques paysagères, l'analyse spatialisée des données permet de faire apparaître des rythmes d'usages sociaux et écologiques de l'espace de la friche urbaine, en partie calés sur les cycles saisonniers et sur l'exploration diffuse et l'occupation temporaire d'un espace en transition.