Auparavant considérée comme problématique par les acteurs économiques, politiques et de l'aménagement du territoire, l'occupation temporaire de lieux vacants ou en friches est devenue une nouvelle stratégie de développement urbain. Faisant partie d'un urbanisme qualifié de « temporaire » ou « interstitiel » (Tonkiss 2013), cette stratégie revêt trois rôles principaux : l'impulsion de la réactivation du lieu vacant, sa gestion transitoire et la revalorisation d'une ressource foncière et spatiale future.
Intégrées progressivement au sein de l'action publique, voire privée, ces stratégies ont fait l'objet de nombreuses recherches au sein des territoires urbains denses. Les conclusions ont notamment valorisé la friche comme une temporalité d'entre-deux permettant d'abriter temporairement une économie informelle et précaire ou des activités artistiques ou culturelles. De ces espaces, émerge une urbanité non planifiée (Groth et Corijn, 2005) créatrice de nouveaux rapports sociaux (Ambrosino et Andres, 2008).
Néanmoins, si ces territoires vacants représentent des opportunités foncières évidentes dans les marchés tendus, peut-on tirer les mêmes conclusions dans des territoires urbains moins tendus ? La friche peut-elle également générer de nouveaux rapports sociaux ?
En effet, les gestionnaires locaux de petites et moyennes agglomérations se cantonnent au quotidien à diriger ces espaces dits "verts" de manière mono-fonctionnaliste et réglée, soit par peur d'une image négative de la « friche urbaine », soit par simplification de la gestion confiée la plupart du temps à des entreprises privées via des marchés publics, soit en attendant de construire ces vides.
Dans cette communication nous nous intéresserons dans un premier temps à l'analyse des outils mis en place à l'échelle du territoire Wallon : le plan d'affectation du sol et le plan de secteur. Adoptés en 1977 et révisés en 1987, ces outils vieillissants génèrent-ils des espaces juridiquement flous et donc des espaces d'entre-deux en friche ?
Dans un deuxième temps, nous nous attacherons à identifier les relations entre la politique de développement du territoire et la génération d'espaces interstitiels[1] végétalisés au regard de la gérance locale de l'espace par les mandataires publics et privés. Nous prendrons un cas d'étude situé à Mons, en Wallonie: le Parc du Bois de Mons.
Enfin, dans une troisième partie, nous prévoyons de démontrer comment l'urbanisme temporaire peut s'inscrire, toujours sur le cas du Parc du bois de Mons, dans un entre-deux spatial et temporel et comment il peut préfigurer des espaces d'usages sur le long terme et donc s'inscrire dans une politique plus globale de développement territorial.
Dans son ensemble, la proposition tentera d'exprimer la nécessité d'un renouvellement des modes de faire la ville à la fois à l'échelle locale, grâce à certaines actions dites « temporaires » mais aussi à l'échelle globale avec la prise en compte de ces espaces « d'entre deux » dans une vision prospective.
[1] Que le paysagiste Gilles Clément qualifie aussi de « tiers-paysage » (2004)