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Les délaissés jardinés : des espaces de l'entre-deux aux territoires qui rassemblent ? L'exemple des écoquartiers en Ile-de-France
Yves Petit-Berghem  1@  
1 : Laboratoire de Recherche de lÉcole Nationale Supérieure du Paysage
ENSP

Dans un contexte de forte mobilité de la population et de recomposition des territoires, de nouvelles pratiques respectueuses de l'environnement et de la biodiversité apparaissent et contribuent à la mise en valeur de nouveaux lieux. Il s'agit d'espaces d'entre-deux (entre ville et campagne) porteurs de projets de territoires souvent ambitieux destinés à repenser l'action territoriale en l'adaptant aux nouveaux enjeux écologiques de la commande publique. Le développement de l'écologie urbaine à partir des années 1980 puis la définition et la défense du Tiers-Paysage par Gilles Clément participent à ce changement de paradigme où le citoyen est au cœur d'un processus permettant l'émergence d'écosystèmes urbains nouveaux. Les délaissés jardinés représentent l'une des manifestations de ce cadre nouveau. En général coproduits et cogérés par les acteurs de la société civile et les acteurs institutionnels, ils sont aussi mobilisés comme leviers de pratiques multiples, en particulier dans le cadre des jardins familiaux.

Les écoquartiers constituent en France des lieux propices à l'expérimentation de ces pratiques et valeurs visant à renouveler la fabrique du projet urbain. Les pratiques jardinières et habitantes sont communes dans ces zones réhabilitées marquées par d'anciennes occupations du sol souvent polluantes ou non respectueuses de l'environnement. Mais les projets d'écoquartiers font aussi partie d'un marketing territorial dont les politiques s'emparent et le discours qui les accompagne nivelle souvent la complexité des enjeux écologiques en oubliant de les insérer dans un territoire mû par une histoire et composé d'habitants qui ont aussi leur propre discours et représentation de la nature. Face à un discours normatif érigeant le jardinier en écocitoyen idéal, le label écoquartier met les habitants en position d'acteurs de leur cadre de vie. Or, les citoyens veulent donner du sens à leurs pratiques et ont aussi un besoin de connaissances, en particulier lorsqu'ils jardinent sur des terrains dont ils ne connaissent pas le passé. La volonté de mieux connaître ce que le citoyen consomme et de comprendre ce que la nature produit n'est pas en inadéquation avec ce qu'affiche ce label mais la réalité locale peut être en décalage avec les intentions de départ lorsqu'un site n'a pas été entièrement dépollué. Lorsque les données manquent, une suspicion peut naître et remettre en cause les engagements de la charte et de concrétisation des ambitions de départ. Dans ces conditions, ces espaces de l'entre-deux peuvent-ils réellement se transformer en territoires qui rassemblent ?

En prenant appui sur la réalisation des projets d'écoquartiers d'Ile-de-France, les réflexions aborderont cette relation complexe entre la promotion de modes d'habiter durable, les discours jardiniers, et les nouvelles configurations socio-spatiales liées à la transformation de ces espaces d'entre-deux.


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